Les écrans ne rendent pas hyperactif
- Noelle
- 13 juil.
- 3 min de lecture
Ils apaisent parfois un monde trop violent

La connerie m’exaspère, et encore plus dans ma propre famille. J’en ai très mal dormi.
Hier, mon frère m’a encore sorti cette phrase stupide à propos de sa fille de 9 ans : “Elle est hyperactive à cause de sa tablette, elle ne joue jamais avec les autres.”
Et ça m’a tellement tendue que j’ai eu besoin d’écrire ce billet, là, maintenant, pour évacuer.
Parce que non, sa fille n’est pas “comme ça” à cause de l’écran. Et plus globalement, aucun enfant ne devient neuroatypique à cause d’un écran. Mais par contre, beaucoup d’enfants se réfugient dedans parce qu’ils n’ont pas d’autre endroit où exister sans être en lutte.
Pourquoi les enfants fuient-ils le monde réel ?
Trop de bruit, trop de pression, trop de rejet ou de solitude. L’écran, c’est peut-être le seul endroit où il peut respirer.
Chez sa fille, par exemple, ce n’est pas la tablette qui empêche les interactions. C’est le fait qu’elle n’est jamais mise en confiance, jamais accompagnée dans la relation, qu’elle ne se sent pas à sa place avec les autres enfants. Et plutôt que de se prendre des remarques, elle s’enferme. L’écran ne fait que couvrir le silence, ou adoucir le rejet.
Un enfant collé à son écran le fait parce qu’à un moment donné, le monde autour de lui est devenu trop bruyant, trop rapide, trop incompréhensible ou trop injuste.
Un enfant qui se réfugie dans les écrans, c’est peut-être un enfant :
qui ne comprend pas les règles sociales et se sent jugé en permanence,
qui se fait gronder toute la journée à l’école pour des comportements qu’il ne maîtrise pas,
qui est harcelé, moqué ou isolé,
ou qui n’a aucun endroit calme pour souffler dans sa vie quotidienne.
L’écran devient alors un espace de contrôle, de répétition, de clarté. Un endroit où les choses sont prévisibles, où il peut choisir quand interagir, où il peut appuyer sur pause. Et franchement ? Je comprends.
On diabolise les écrans parce que c’est plus facile. On se dit “c’est à cause de la tablette qu’il ne parle pas, c’est à cause du jeu vidéo qu’il n’a pas d’amis”. Mais la vraie question, c’est :
👉 Qu’est-ce qu’il cherche dans cet écran qu’il ne trouve pas ailleurs ?
Peut-être du calme. Peut-être de la reconnaissance. Peut-être juste le droit d’exister sans avoir à se justifier à chaque seconde. Si les adultes se réfugient dans Netflix ou Instagram quand leur journée a été pourrie, pourquoi un enfant ne ferait-il pas pareil ?
L’hyperactivité n’est pas causée par l’écran. Point.
L’hyperactivité, c’est un trouble du neurodéveloppement, pas une conséquence d’un temps d’écran trop élevé. Les écrans peuvent amplifier des comportements, bien sûr. Mais ils ne sont jamais la cause.
Et l’isolement social, ce n’est pas parce que l’enfant “regarde trop de vidéos” que ça arrive. C’est parce qu’il ne se sent pas bienvenu dans les groupes, ou qu’il a été blessé dans ses interactions. L’écran n’est pas l’origine du mal, c’est parfois le seul pansement qu’il a trouvé.
Interdire les écrans sans comprendre ce qu’ils représentent pour l’enfant, c’est comme enlever une bouée à quelqu’un qui se noie sous prétexte qu’elle l’empêche d’apprendre à nager.
Et attention, je ne dis pas qu’il faut laisser les enfants 5 heures par jour sur YouTube. Bien sûr qu’un cadre est nécessaire. Mais il doit être posé avec compréhension, pas avec jugement ou panique morale.
Quand un enfant “s’enferme dans les écrans”, accompagne-le vers autre chose, ne l’en arrache pas violemment.
Crée avec lui une alternative douce et progressive. Pas “va jouer dehors” mais “viens, on regarde ensemble ce que tu aimes, et si on essayait un jeu calme ensemble ?”
Essaie de comprendre ce que l’écran lui apporte : la régulation ? La solitude ? La concentration ? Le silence ?
Aide-le à retrouver ce même besoin dans une autre activité et à son rythme.
Les écrans ne rendent pas nos enfants hyperactifs. Ils révèlent juste ce qu’on n’a pas toujours su voir.Et au lieu de leur reprocher de fuir, écoutons ce qu’ils fuient.
Parce que parfois, ils ne s’isolent pas par plaisir, mais par besoin de survie émotionnelle dans un monde trop hostile à leur sensibilité.
Commentaires