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Autisme - Le radar détraqué des visages

Je crois que j’ai un super pouvoir un peu particulier : je peux croiser quelqu’un dix fois sans jamais savoir si je le connais ou pas. Mon cerveau est une sorte de détecteur de visages… en panne.


Un jour, en rentrant du boulot, une femme m’interpelle dans la rue, tout sourire.

— Salut ! Comment tu vas ?

Je me dis qu’elle se trompe, alors je joue le jeu. Sourire poli, air détendu, réponse vague : « Oui, ça va et toi ? ».

Et là, elle me sort :

— Et Matisse, il va bien ?Là, mon cerveau fait un triple salto arrière. Parce que Matisse, c’est bien mon fils. Donc, statistiquement, il y a peu de change qu'elle me confonde avec une autre. Et pourtant, impossible de remettre son visage. J’ai beau fouiller dans tous mes fichiers mentaux, rien. Page blanche. À ce jour, je ne sais toujours pas d’où je la connais.


Le radar détraqué des visages

Autre scène, autre fiasco. Une soirée, des gens, une femme qui me dit bonjour avec assurance. Son visage me dit vaguement quelque chose, mais impossible de savoir d’où. Je passe la soirée à sourire bêtement en me triturant le cerveau. Et ce n’est que plusieurs jours plus tard que la lumière se fait, en fait c’était la secrétaire de l’entreprise juste au-dessus de celle où je travaillais, celle avec qui je faisais mes pauses clope, tous les jours, à 10h. Voilà pourquoi son visage me semblait familier 😅, sans que mon cerveau sache où le ranger. En dehors des contextes bien définis, c'est le bordel.


Les gens croient souvent qu’on n’est pas attentif ou qu’on “fait semblant de ne pas reconnaître”. En réalité, ce n’est pas de la distraction. Chez beaucoup d’autistes, la reconnaissance des visages n’est pas automatique. Le cerveau typique possède une zone dédiée à cette tâche, le gyrus fusiforme, qui s’allume dès qu’il voit un visage connu. Chez les autistes, cette zone fonctionne différemment : elle ne se déclenche pas aussi fortement, et la reconnaissance se fait par d’autres voies, souvent plus analytiques.


En clair, je ne reconnais pas un visage parce qu’il “m’évoque quelque chose”. Je reconnais une personne grâce à des indices précis : une démarche, une voix, une coupe de cheveux, une expression, ou même le lieu habituel où je la croise. Mais si on déplace cette personne dans un autre contexte, tout mon système de tri s’effondre. C’est comme si mon cerveau rangeait les gens par “décor”. Retirez le décor, et il perd la fiche.


C’est à la fois amusant et épuisant. Amusant, parce que ça donne lieu à des situations absurdes où je souris à des inconnus persuadée qu’on se connaît, ou inversement. Épuisant, parce que chaque interaction devient un petit casse-tête social.


Certains chercheurs parlent de prosopagnosie partielle, ou “difficulté de reconnaissance des visages” chez les personnes autistes. D’autres préfèrent parler d’un mode perceptif différent : on remarque davantage les détails que la globalité. Ce qui est logique quand on y pense : le cerveau autistique ne généralise pas, il observe.


Alors non, je ne suis pas malpolie quand je ne reconnais pas quelqu’un. Mon cerveau, lui, a juste besoin d’un peu plus de contexte pour faire le lien. Et puis avec toutes les informations qu’il stocke déjà — les dates, les chiffres, les anecdotes et les moindres détails — il faut bien qu’il oublie quelque chose. Apparemment, il a choisi les visages et les noms aussi, une fois j'ai mis 3 semaines à enregistrer le nom de famille de mon patron, mais ça c'est une autre histoire 😜.

1 commentaire

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Namkha
15 nov.
Noté 5 étoiles sur 5.

J'ai ce même problème, c'est de la prosopagnosie, comorbidité fréquente au tsa

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